L'industrie automobile tarde à utiliser des
technologies éprouvées, plus propres et plus
efficaces
Louis-Gilles Francoeur
Édition du mercredi
12 mars 2008 <file:///C:/2008/03/12/>
Antoine Gillier
est un paisible agriculteur de l'Allier, en France, qui ne se doutait pas que
ses talents de bricoleur allaient le rendre célèbre à l'échelle internationale.
Agriculteur biologique, il pestait depuis des années, raconte-t-il au Devoir,
chaque fois qu'il voyait son moteur diesel cracher ses épaisses fumées.
Jusqu'au jour où il est tombé sur un devis de Paul Pantone, cet ingénieur
américain qui a donné son nom à une invention offerte gratuitement à la
communauté internationale sur son site Internet en 1999 pour que son moteur à
essence, dopé à l'eau, finisse par s'imposer à l'industrie
automobile.
Ce n'est pas d'hier que des inventeurs utilisent de l'eau
pour augmenter la performance des moteurs à essence, aussi paradoxal que cela
puisse paraître. Durant la Seconde Guerre mondiale, les Britanniques dotaient
leurs avions de chasse Spitfire d'un petit réservoir rempli d'eau pour
disparaître littéralement de la mire des Messerschmitts allemands, équipés de
moteurs à réaction plus rapides. L'eau, injectée directement sur les pistons,
portait le régime du moteur à des sommets invraisemblables, ce qui imposait
souvent de refaire le moteur au retour. Mais le pilote était sauf. Quand les
premiers chasseurs américains ont tenté de s'envoler des porte-avions, la piste
de métal était décidément trop courte. Les F4U Corsair ont alors été équipés
d'injecteurs d'eau, ce qui faisait passer instantanément leur puissance de 1850
CV à 2400 CV, le temps d'un envol!
De nombreux systèmes ont été
utilisés depuis la fin du XIXe siècle pour ajouter aux moteurs thermiques la
puissance de l'eau et celle de la chaleur perdue dans les échappements.
Charles Nelson Pogue, un inventeur canadien, a obtenu un brevet en 1935
qui atomisait littéralement l'essence en la surchauffant avec les gaz
d'échappement, ce qui permettait de remplacer tout simplement le carburateur
classique. Il prétendait pouvoir faire passer ainsi la consommation d'essence
autour de 200 milles au gallon en alimentant le moteur avec une vapeur
d'essence plus fine que les gouttelettes des injecteurs actuels. Son idée, très
juste, vient d'être reprise par la société Fuel Vapor de Vancouver, qui se
prépare à commercialiser la Alé, une voiture trois roues capable de grimper à
100 km/h en cinq secondes avec une consommation de 2,5 litres par 100 km et une
réduction de 75 % des émissions de CO2!
Le «réacteur» Pantone
Même si des centaines de brevets proposent des façons d'utiliser de
l'eau dans des moteurs à essence, c'est l'ingénieur Paul Pantone qui a vraiment
proposé en 1998 un premier système adaptable et relativement simple à bricoler.
Un réservoir de cinq litres situé sous le capot, appelé le «bulleur», contient
un mélange d'essence et d'eau dans lequel sont injectés une partie des gaz de
l'échappement, qui portent ce liquide au point d'ébullition. La pression
générée par cette vapeur mixte la pousse dans une tubulure dirigée vers
l'admission d'air du moteur. Mais avant d'y arriver, les vapeurs d'eau et d'air
passent dans un tube surchauffé par les gaz d'échappement dans un montage qui
ionise peut-être les gaz en question; personne ne sait vraiment faute de
véritables études en laboratoire.
Il en résulte, explique Pierre
Langlois, un physicien et consultant qui va publier à l'été chez Multimondes un
livre intitulé Rouler sans pétrole, qu'une partie de l'énergie perdue dans
l'échappement est récupérée par les gaz surchauffés qui sont aspirés par le
moteur, d'où un gain certain d'énergie.
Le devis de Pantone, qui a fait
le tour du monde sur Internet, a émoustillé les clubs de bricoleurs de la
planète alors que les bureaux d'ingénieurs des constructeurs automobiles
restaient de glace. C'est alors qu'Antoine Gillier, du fond de l'Allier,
s'inspirant des essais d'autres inventeurs de son pays, décide d'adapter le
système Pantone à son tracteur diesel, ce qui ne s'était pas encore fait. Il a
d'abord éliminé le mélange eau-essence proposé par Pantone pour se contenter
d'un «bulleur» d'eau, laquelle est surchauffée par la chaleur de l'échappement.
La vapeur ainsi produite est injectée dans l'admission d'air du diesel tout
simplement.
Ce système éminemment simplifié rend pourtant le moteur
diesel plus puissant, plus tranquille, moins polluant et énormément moins
énergivore. Aujourd'hui, près de 1000 tracteurs de ferme ont été équipés en
France du système «G-Pantone» (pour Gillier-Pantone), qu'on vient voir de
partout dans le monde, ce qui embarrasse fort ce paisible paysan, d'abord
préoccupé de ses champs. Mais si son système s'adapte particulièrement bien aux
vieux diesels, il est difficile à adapter aux systèmes contrôlés par ordinateur
d'aujourd'hui, qui ne comprennent pas ce qui se passe quand on leur envoie des
gaz trop propres parce que dopés à l'eau! Ils réclament alors plus de pétrole
pour les pistons, qu'ils estiment sous-alimentés.
De sa ferme, Antoine
Gillier nous raconte qu'il a obtenu une réduction de 60 % de sa consommation
de pétrole, «ce qui soulage beaucoup le budget», et que le rendement
énergétique est plus élevé quand son moteur dopé à l'eau travaille plus fort,
sans doute en raison de la hausse de température dans l'échappement. La
plupart des agriculteurs-bricoleurs qui utilisent son système obtiennent en
moyenne des réductions de consommation de 30 à 40 %, dit-il.
La chaîne
TFI a testé -- le reportage est disponible sur YouTube -- une petite voiture
diesel dopée à l'eau avec le système G-Pantone. Les émissions de CO2 (le gaz à
effet de serre de référence) chutent alors de 8,6 % à 0,1 %, alors que les
oxydes d'azote passent de 348 parties par million à 168 ppm et que les
hydrocarbures chutent de 3 à 1 ppm, avec une consommation d'essence réduite
d'environ 20 %.
Un mystère
Même pour un physicien comme Pierre
Langlois, ce qui se passe dans une chambre de combustion dopée à l'eau demeure
une inconnue, d'autant plus outrageante, dit-il, que l'industrie automobile
n'approfondit pas ces résultats obtenus par ces bricoleurs, que l'on snobe
parce que leurs idées ne viennent pas d'ingénieurs ou de laboratoires
patentés.
Au Québec, le professeur Yvon Tremblay, du Cégep d'Alma, qui
vient d'écrire un livre sur les moteurs de tracteurs, a décidé de soumettre le
système G-Pantone à une série de tests scientifiques afin d'élucider quels
sont les paramètres déterminants de cette technologie pour mieux la
domestiquer.
Plusieurs avancent l'hypothèse que la vapeur d'eau qui
dope les moteurs est fragmentée sous la pression et la chaleur extrêmes des
chambres de combustion. De l'hydrogène et de l'oxygène à l'état pur
s'ajouteraient alors au carburant, augmentant la qualité, l'efficacité et la
puissance de l'explosion.
On sait depuis longtemps qu'il suffit
d'ajouter seulement 1 % d'hydrogène dans un moteur thermique en fonctionnement
pour augmenter considérablement sa performance, un procédé que plusieurs
sociétés, explique Pierre Langlois, commercialisent depuis des années de
différentes manières. Méconnus du grand public, ces procédés de «dopage à
l'hydrogène» donnent des résultats très semblables à ceux du moteur G-Pantone,
dopé pourtant simplement à l'eau.
Le MIT a mis au point dans les
années 90 un système qui produit de l'hydrogène à bord d'un véhicule par
l'utilisation d'un arc électrique de faible puissance alimenté par
l'alternateur. Ce système décompose un mélange d'eau et de carburant. Ce petit
appareil, baptisé Plasmatron, ne consomme que 100 watts. Il permet, grâce aux
atomes d'hydrogène injectés dans le moteur, d'en réduire jusqu'à 30 % la
consommation et d'éliminer 80 % des oxydes d'azote, sans catalyseur.
Le Los Alamos National Laboratory des États-Unis arrive à un résultat
similaire par une décharge de courant dans le carburant un peu avant qu'il se
présente aux injecteurs, qui l'introduisent dans le moteur. Il se produit
alors un minuscule plasma qui atomise littéralement l'essence en plus de
dégager des molécules d'hydrogène. Près d'une dizaine de sociétés
commercialisent déjà d'autres systèmes de dopage «embarqués», qui produisent
de l'hydrogène par électrolyse de l'eau, assurant des économies de 10 à 20 %
de carburant à des centaines de poids-lourds nord-américains et une réduction
équivalente de leurs émissions de GES.
Personne ne peut expliquer
pourquoi ces dispositifs éprouvés ne se retrouvent pas sur des voitures de
série.
«Deux grands facteurs expliquent le peu d'intérêt des
constructeurs automobiles pour ces solutions qui pourraient avantageusement
remplacer les convertisseurs catalytiques et réduire substantiellement la
consommation de carburant, explique le physicien Langlois. D'abord, ils
boudent en général les idées des bricoleurs, même de génie, alors qu'ils
devraient être les premiers à reprendre ces idées, à les tester et à en tirer
des équipements plus performants. Mais on ne peut pas non plus éliminer l'idée
de la vieille collusion avec l'industrie pétrolière, qui remonte à
l'association entre GM, Standard Oil et Firestone dans les années 30, lesquels
avaient été condamnés pour avoir fait disparaître les tramways des villes pour
les remplacer par de gros autobus polluants. Les constructeurs font toujours
de plus gros bénéfices avec la vente de gros moteurs et l'industrie pétrolière
y trouve évidemment son compte!»
Cordialement
Pierre Langlois,
Ph.D.
physicien : consultant / auteur
tél: (418)
875-0380
***VOIR AU-DELÀ DES APPARENCES, GARDER L’ESPRIT OUVERT ET AGIR !
***Plus on s’informe et plus on en parle, plus ces inventions seront désirées et produites.
Site Web de Pierre Langlois Sommaire des solutions pour la planète